Volodia Pozner n’a jamais cessé de surprendre ses lecteurs. Chaque nouveau livre était différent, pas sa facture, son imagination, son écriture, son sujet. D’autres l’ont déjà dit, mais je le répète juste à propos des Brumes de San Francisco. Un auteur renommé, à l’âge de quatre-vingts ans, s’aventure, avec un succès étonnant, sur le chemin d’une modernité que son œuvre ne semblait pas annoncer. Je pense au retour à la modernité du vieil Aragon, son grand ami. Quel courage, quel exemple.
Antonin J. Liehm, 2006
Sur le bureau de Vladimir Pozner, il y a la petite main de Touche pas Ă mon pote. Sur les rayonnages de sa bibliothèque, ses livres et leurs traductions, ce qui prend dĂ©jĂ pas mal de place, et une Ă©dition du Grand Larousse de la langue française. Dans le fauteuil, en contrejour de la fenĂŞtre qui donne sur cette petite rue du sixième arrondissement de Paris, il y a un homme, qui, en d’autres lieux, pourrait fort bien passer pour un vieux chef indien.
Cela amuse beaucoup Pozner, cette ressemblance avec les Indiens d’AmĂ©rique. Il raconte comment, sortant un jour d’une boutique du boulevard Raspail, il est abordĂ© par une femme qui lui dit : « You are an american Indian. » Pozner sourit, dit qu’il en serait flattĂ©, mais que ce n’est pas le cas. La femme n’en dĂ©mord pas : « Vous ĂŞtes un Indien amĂ©ricain, je le sais, allez, vous pouvez me le dire, personne n’Ă©coute. » Puis en confidence : « Dites-le moi, moi aussi je suis indienne. » De cette rencontre sont nĂ©es Les Brumes de San Francisco.
Jean-Michel Ollé, 1985